Loi de sécurisation de l'emploi (1/2)

Lors de la conférence sociale de juillet 2012 était reconnue la nécessité de concilier sécurité des salariés et flexibilité des entreprises, passant par plus de dialogue social. Les partenaires sociaux négociaient et concluaient le 11 janvier 2013 un Accord National Interprofessionnel, sur la base duquel un projet de loi était soumis aux parlementaires. Après de nombreuses heures de débat, la discussion de multiples amendements, un recours constitutionnel... la loi n°2013-504 relative à la sécurisation de l'emploi a été promulguée par le Président de la République le 14 juin 2013 et publiée au J.O. du 16.

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La loi de sécurisation de l'emploi en 27 articles apporte certaines modifications significatives au droit du travail actuel. Nous vous présentons dans cet article celles des réformes qui auront le plus grand impact sur les employeurs de la branche du sport.
Il s'agira dans cette première partie du volet prévoyance, de la réforme du temps partiel et de l'impact de la loi sur les institutions représentatives du personnel.
 
LE VOLET PREVOYANCE / FRAIS DE SANTE (ARTICLE 1)

Généralisation de la complémentaire

La loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 prévoit que toutes les entreprises devront disposer d'une couverture minimale en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident (complémentaire santé) à compter du 1er janvier 2016.

Il convient de noter que les associations sportives ne sont pas exclues du champ d'application de ce dispositif, qui concerne tous les employeurs, quel que soit leur effectif.

La loi prévoit un processus de mise en place en différents étages.

1-    Ainsi, le premier étage consiste à confier aux branches professionnelles une telle négociation, qui devait être ouverte avant le 1er juin 2013.
Tel a bien été le cas dans la branche du sport, puisque la commission mixte paritaire réunie le 9 avril 2013 a acté la constitution d'un groupe de travail ad hoc, dont la première réunion s'est tenue le 21 mai 2013.
Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l'évolution de cette négociation par le biais des rubriques actualités et dialogue social de notre site internet.

2-    Si la négociation de branche échouait, il appartiendrait dans un second temps  aux entreprises dotées de délégués syndicaux de négocier avec ces derniers un tel accord à compter du 1er juillet 2014.

3-    A défaut, il appartiendrait à l'employeur, de mettre en place unilatéralement cette couverture complémentaire frais de santé (art. L. 911-7 I CSS).

Dans tous les cas, un socle de garanties minimales est fixé par la loi. Ainsi, cette couverture minimale devra comprendre en tout ou partie (art. L. 911-7 II CSS) :
-    La prise en charge du ticket modérateur de l’assuré ;
-    Le forfait journalier hospitalier ;
-    Les frais exposés pour les soins dentaires ou liés à certains dispositifs médicaux à usage individuel (prothèse dentaire, optique…).
Un décret viendra préciser le niveau de prise en charge de ces dépenses et la liste des dispositifs médicaux concernés.

Il est également précisé dans le Code de la Sécurité sociale que l’employeur devra financer au moins la moitié de cette couverture. Toutefois, la loi envisage le cas particulier des salariés à employeurs multiples et/ou à temps très partiel, pour lesquels elle renvoie le soin à un décret de prévoir des modalités spécifiques de financement.



Généralisation et amélioration du système de « portabilité » de la prévoyance

- Maintien gratuit pendant 12 mois :

L’Accord National Interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail a mis en place un système de portabilité des droits de prévoyance et de frais de santé pour les salariés perdant leur emploi, hors faute lourde, qui pouvaient prétendre à une période de chômage indemnisée.

La portabilité des droits en matière de prévoyance et couverture santé des salariés n’était jusqu’alors pas applicable aux employeurs de la branche du sport.

En effet, ce dispositif prévu par l’ANI du 14 janvier 2008 résultait d’un accord signé uniquement par le MEDEF, la CGPME et l'UPA, organisations patronales auxquelles le COSMOS n’est pas adhérent.

En outre, bien qu’étendu, cet accord n’avait pas été élargi par le ministre du travail, ce qui le rendait inapplicable aux employeurs qui n’étaient pas visés par son champ. En l'occurrence ce champ était défini par les activités représentées par les signataires de l'accord : le secteur de l'industrie, du commerce et des services. Le sport relevant pour l’heure du secteur de l’économie sociale et solidaire n’en relevait donc pas.

Dans un double objectif de généralisation et d’amélioration du système de portabilité de la prévoyance, la loi de sécurisation de l’emploi est intervenue (art. L. 911-8 CSS nouveau).

Le délai pour la mise en place de cette nouvelle portabilité est fixé au 1er juin 2014 pour le remboursement des frais de santé et au 1er juin 2015 pour les garanties de prévoyance.

Dès lors, en cas de rupture du contrat de travail, hors faute lourde, ouvrant droit aux allocations versées par Pôle emploi, le salarié continuera de bénéficier des garanties en vigueur dans l’entreprise, à condition que ses droits à couverture complémentaire y aient été ouverts.

Les garanties de prévoyance seront maintenues à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d’indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail, sans pouvoir excéder 12 mois. L’ANI de 2008 prévoyait une portabilité pour une durée maximale de 9 mois.

La loi précise également que le dispositif de portabilité sera gratuit pour l’ancien salarié qui peut y prétendre. En pratique, le financement de la portabilité devrait être mutualisé. Il serait ainsi intégré à celui de la prévoyance et de la complémentaire santé et reposerait donc conjointement sur l’employeur et les salariés actifs.

Par ailleurs, l’employeur sera soumis à une obligation d’information du salarié. De la même façon que pour le DIF, l’employeur devra mentionner sur le certificat de travail remis au salarié au moment de la rupture le maintien des garanties prévoyance et frais de santé.

L’employeur devra également informer l’organisme assureur de la cessation du contrat de travail.

- Au-delà de la portabilité obligatoire :

A l’issue de la période de portabilité « obligatoire » décrite ci-dessus et dans un délai de 6 mois, les salariés pourront solliciter de l’organisme assureur le maintien de leur couverture frais de santé, moyennant cotisation (modification de la loi Evin du 31 décembre 1989 ; article 1 III de la loi de sécurisation de l’emploi).

L’organisme gestionnaire devra alors adresser à l’ancien salarié une proposition en ce sens dans les deux mois à compter de la fin de la période de maintien des garanties. Concrètement, le salarié conclura un contrat individuel avec ledit organisme, qui ne sera pas limité dans le temps.

Les tarifs de ce contrat pourront être supérieurs aux tarifs globaux applicables aux salariés dans la limite d’un surcoût de 50%. En pratique, le coût pourra être assez élevé pour l’ancien salarié.

Les nouveautés de ce dispositif entreront en vigueur au 1er janvier 2014.


L'ENCADREMENT DU TRAVAIL A TEMPS PARTIEL (ARTICLE 12)

Introduction d'une durée minimale de travail hebdomadaire de 24 heures (art. L. 3123-14 c. trav.)

A titre liminaire, il convient de préciser que ces nouvelles règles relatives au temps partiel n’impactent pas les CDI intermittent. En effet, ces deux contrats sont juridiquement distincts dans la mesure où ils font l'un et l'autre l'objet de sections séparées dans le Code du travail. En outre, l'article 4.5.1 de la CCNS tel que modifié par l'avenant 81 du 5 décembre 2012 rappelle expressément que le CDII est un contrat juridiquement autonome et distinct du contrat à temps partiel (art. 4.5.1 CCNS).

L’objectif de la loi est de permettre aux salariés à temps partiel d’adapter leurs durée et horaires de travail à leur organisation personnelle, pour ne plus subir le temps partiel. Cette durée minimale de 24 heures hebdomadaires, ou la durée équivalente lorsque l’établissement organise la répartition de la durée du travail sur le mois ou sur une autre période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année en application d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche, entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2014.

- Des règles transitoires jusqu’au 1er/01/2016 :

Des règles transitoires sont prévues pour les contrats à temps partiel en cours à cette date. En l’absence de convention ou d’accord de branche étendu fixant une durée inférieure au 1er/1/2014 (une négociation devrait être ouverte en ce sens entre les partenaires sociaux de la branche Sport), la loi prévoit que jusqu’au 1er janvier 2016 la durée minimale légale ne sera applicable que si le salarié en fait la demande. En outre, l’employeur pourra refuser s’il justifie d’une impossibilité liée à l’activité économique de l’entreprise (art. L. 3123-14-3 C. trav., nouv.). Reste à définir en quoi consiste cette impossibilité.

- Les exclusions et dérogations prévues par la loi à la durée minimale légale de 24 heures :

Les dérogations tenant à l’employeur ou au salarié  :

-les entreprises de travail temporaire d’insertion (art. L. 5132-6 c. trav.) ainsi que les associations intermédiaires (art. L. 5132-7 c. trav.) pourront proposer aux personnes qu’elles embauchent une durée de travail inférieure, lorsque le parcours d’insertion le justifie ;
-les salariés de moins de 26 ans poursuivant leurs études pourront se voir fixer une durée du travail inférieure compatible avec leurs études (art. L. 3123-14-5 c. trav.).
 
- Les dérogations à la demande du salarié (art. L. 3123-14-2 c. trav., nouv.) :

A la demande du salarié, une durée inférieure à 24 heures pourra être fixée par demande écrite et motivée, pour lui permettre :
-soit de faire face à des contraintes personnelles ;
-soit de cumuler plusieurs activités afin d’atteindre une durée globale d’acticité correspondant à un temps plein ou au moins égale à 24 heures.

Dans ces deux, il sera obligatoire de regrouper les horaires de travail sur des journées ou des demi-journées régulières ou complètes. Un accord d’entreprise ou de branche étendu pourra déterminer les modalités selon lesquelles s’opère ce regroupement.
L’employeur devra en outre informer chaque année le comité d’entreprise (CE) ou à défaut les délégués du personnel (DP) du nombre de demandes de dérogation individuelle qu’il a reçues.

- Les dérogations possibles par voie de négociation au niveau de la branche (art. L. 3123-14-3 et L. 3123-14-4 c. trav., nouveau) :

Une convention de branche étendue pourra fixer une durée du travail inférieure à la durée minimale légale à condition de comporter des garanties quant à la mise en œuvre d’horaires réguliers ou permettant au salarié de cumuler plusieurs activités afin d’atteindre une durée globale d’activité correspondant à un temps plein ou au moins égale à 24 heures.
La loi précise également que cette dérogation ne sera possible qu’à condition de regrouper les horaires de travail du salarié sur des journées ou demi-journées régulières ou complètes, selon les modalités éventuellement fixées par l’accord de branche étendu ou un accord d’entreprise.



Majoration des heures complémentaires (arts. L. 3123-17 et L. 3123-19 c. trav.) 

Jusqu’ici, les heures complémentaires réalisées dans la limite de 10% de la durée contractuelle de travail ne donnaient pas lieu à majoration, et celles effectuées entre 10% et un tiers de la durée du travail étaient majorées de 25% (art. L. 3123-19 c. trav. ; art. 4.6.3 CCNS).

A compter du 1er/1/2014, chacune des heures accomplies dans la limite de 10% de la durée du travail prévue au contrat au cours de la période de répartition de la durée du travail applicable donnera lieu à une majoration du salaire de 10% (art. L. 3123-17 c. trav.).

La majoration de 25% reste inchangée pour les heures complémentaires effectuées au-delà de 10% de la durée contractuelle. Toutefois, une convention ou un accord de branche étendu pourra prévoir un taux de majoration différent, sans que celui-ci puisse être inférieur à 10%. Un seul accord d’entreprise ne peut modifier ce taux.



Possibilité d'augmenter temporairement la durée contractuelle de travail par avenant (art. L. 3123-25 c. trav.)

La loi prévoit la possibilité d’augmenter temporairement la durée contractuelle du travail par avenant. Ce complément d’heures est donc subordonné à l’accord du salarié. Le dispositif prévoit des garanties pour le salarié :

- Une convention ou accord de branche étendu doit déterminé le nombre maximal d’avenants pouvant être conclus dans la limite de huit par an et par salarié (en dehors des cas de remplacement d’un salarié absent nommément désigné) et les modalités selon lesquelles les salariés peuvent bénéficier prioritairement des compléments d’heures. L’accord peut également prévoir la majoration salariale des heures effectuées dans le cadre de l’avenant.

- L’avenant au contrat doit mentionner les modalités selon lesquelles les compléments d’heures peuvent être accomplis (la loi ne le précise pas ces modalités mais selon le rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale elles devraient recouvrir le nombre d’heures prévues, la répartition sur la semaine ou le mois ainsi que la période concernée) (art. L. 3123-14 c. trav.).

- Les heures complémentaires accomplies au-delà de la durée déterminée par l’avenant donnent lieu à une majoration de salaire qui ne peut être inférieure à 25%.
 


Aménagements possibles du temps partiel au niveau de la branche

La loi rend obligatoire l’ouverture d’une négociation sur les modalités d’organisation du temps partiel dans les branches où au moins un tiers des effectifs occupe un emploi à temps partiel (art. L. 2241-13 c. trav., nouveau).

Si ce seuil est atteint lors de la publication de la loi, la négociation doit être engagée dans les trois mois, soit au plus tard le 13 septembre 2013.

Cette négociation devra au moins porter sur :

- la durée minimale d’activité hebdomadaire ou mensuelle ;

- le nombre et la durée des périodes d’interruption d’activité (au cours d’une même journée) ;

- le délai de prévenance préalable à la modification des horaires de travail ;

- la rémunération des heures complémentaires.

Il convient donc de s’interroger sur l’importance du travail à temps partiel dans la branche pour apprécier l’existence de cette obligation de négociation. Néanmoins, en dépit de l’incertitude sur la réalité de l’obligation à ouvrir cette négociation dans le sport, plusieurs raisons rendent opportune l’ouverture d’une telle négociation :

- permettre de calculer une durée équivalente, sur le mois ou l’année, à la durée minimale de 24 heures hebdomadaires (art. L. 3123-14-1 nouveau) ;

- permettre de fixer une durée minimale hebdomadaire de travail inférieure à 24 heures (en apportant des garanties quant à la mise en œuvre d’horaires réguliers ou permettant au salarié de cumuler plusieurs activités, afin d’atteindre une durée globale d’activité correspondant à un temps plein ou au moins égale à 24 heures par semaine : art. L. 3123- 14-2 nouveau) ;

- permettre de fixer un taux de majoration des heures complémentaires accomplies jusqu’au tiers de la durée contractuelle inférieur à 25 % (mais au moins égal à 10 % : art. L. 3123-19 modifié) ;

- permettre, par un avenant au contrat de travail, d’augmenter temporairement la durée du travail prévue par le contrat de travail ;

- permettre à l’employeur dont le salarié à temps partiel demande le passage à temps complet, de proposer à ce dernier un emploi à temps complet ne ressortissant pas à sa catégorie professionnelle ou un emploi à temps complet non équivalent (art. L. 3123-8 c. trav.).

 


L'IMPACT DE LA LOI SUR LES INSTITUTIONS REPRESENTATIVES DU PERSONNEL

 

 

 

La loi du 14 juin 2013 a souhaité laisser plus de temps aux employeurs qui franchissent les seuils d’effectifs déclenchant l’organisation des élections des institutions représentatives du personnel.

Les articles L. 2314-2 pour l’élection des délégués du personnel et L. 2324-3 pour l’élection du Comité d’entreprise tels que modifiés par la loi de sécurisation de l’emploi prévoient désormais que « lorsque l'organisation de l'élection est consécutive au franchissement du seuil mentionné à l'article [L. 2312-2 pour les DP et L. 2322-2 pour le CE], le premier tour doit se tenir dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour de l'affichage », contre quarante-cinq seulement auparavant.

Pour rappel, selon l’article L. 2312-2 du Code du travail, le seuil de déclenchement des élections des DP est fixé à 11 salariés et l’article L. 2324-3 celui des élections du CE est fixé à 50.

Afin de tenir compte au mieux des caractéristiques des structures de la branche du sport, la CCNS a prévu un abaissement du seuil de déclenchement des élections des DP. En effet, ce seuil est fixé à 7 salariés selon l’article 3.3.1 CCNS.

La question de la transposition de ce nouveau délai à l’hypothèse du franchissement du seuil de 7 salariés peut donc se poser.
Selon nous, ce délai de faveur est pleinement transposable, dans la mesure où le premier paragraphe de l’article 3.3.1 de la CCNS stipule en guise d’introduction que « les délégués du personnel seront élus et exerceront leurs fonctions dans les conditions fixées par les dispositions de la loi et des textes subséquents, complétés par les dispositions suivantes (…) ».

Par ailleurs, la loi prévoit désormais qu’en cas de franchissement du seuil de 50 salariés, les entreprises concernées bénéficient d’un délai d’un an pour la mise en œuvre des obligations légales récurrentes d’information et de consultation du CE. Ce délai ne devrait en revanche pas s’appliquer aux obligations de l’employeur envers les DP.

 

 

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