Rupture conventionnelle et AT/MP

La Cour de cassation précise pour la première fois qu’une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de suspension du contrat consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle.

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Dans un arrêt en date du 30 septembre 2014 (Cass. Soc ; 30/09/2014 ; n°13-16.297), la Cour de cassation précise pour la première fois qu’une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de suspension du contrat consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, en l’absence toutefois de fraude ou vices du consentement établis par le salarié.

Pour rappel, la rupture conventionnelle est un dispositif de rupture du contrat de travail à durée indéterminée d’un commun accord des parties, mis en place par la loi du 25 juin 2008.

Par ailleurs, la législation protectrice des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle interdit à l’employeur de rompre le contrat durant la période de suspension, sauf faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie (art. L. 1226-9 C.trav). Cette interdiction légale de licencier a été étendue par la jurisprudence à la mise à la retraite, à la rupture de la période d’essai, et à l’ancienne rupture amiable fondée sur l’article 1134 du Code civil.

Toutefois, dans son arrêt du 30 septembre, la Cour de cassation a décidé de ne pas étendre le champ de cette interdiction à la rupture conventionnelle homologuée. Celle-ci peut donc être valablement signée durant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou une maladie professionnelle. Cette décision va à l’encontre de ce qu’indiquait la Direction générale du Travail dans sa circulaire de 2009 (http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2009/04/cir_2765.pdf).

En l’espèce, une salariée avait été victime d’un accident du travail et bénéficiait d’un arrêt de travail d’une durée supérieure à 8 jours. A son retour dans l’entreprise, celle-ci n’avait pas bénéficié d’une visite de reprise (alors qu’au moment des faits, celle-ci était obligatoire au bout de 8 jours d’absence pour AT). Après différents entretiens avec son employeur, la salariée signe une rupture conventionnelle qui est homologuée par l’autorité administrative.

Compte tenu du fait que la rupture conventionnelle est intervenue au cours d’une suspension du contrat de travail consécutive à un accident de travail (l’employeur avait omis d’organiser la visite médicale de reprise alors que seule cette visite peut mettre fin à la suspension du contrat de travail), la salariée conteste la validité de sa rupture conventionnelle. Pour tenter de justifier sa demande, l’intéressée soutenait que l’employeur ne peut rompre le contrat de travail au cours des périodes de suspension pour accident du travail que s’il justifie d’une faute grave de l’intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie.

La Cour de cassation censure cette argumentation et tranche ainsi le débat de la compatibilité entre la rupture conventionnelle homologuée et la législation protectrice des salariés victimes d’accident ou de maladie professionnelle. Elle décide ainsi que « sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, non invoqués en l’espèce, une rupture peut être valablement conclue en application de l’article L. 1237-11 du Code du travail au cours de la période de suspension consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle ».
Il est donc possible d’envisager une rupture conventionnelle pendant la période d’arrêt de travail ou entre le retour dans l’entreprise du salarié et la tenue de la visite de reprise (désormais obligatoire après une maladie professionnelle ou une absence d’au moins 30 jours pour accident du travail).

La Cour suprême rappelle toutefois que cette possibilité est subordonnée à l’absence de vice de consentement et de fraude de l’employeur. Le salarié pourra ainsi remettre en cause la rupture conventionnelle s’il démontre que son consentement a été vicié par la violence, le dol ou l’erreur. Il conserve en outre la faculté de démontrer l’intention frauduleuse, c’est-à-dire la volonté de l’employeur d’échapper aux dispositions protectrices en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle.

Après avoir admis que la rupture conventionnelle puisse être signée dans un contexte conflictuel (Cass. Soc ; 15/01/2014, n°12-23.942), cet arrêt vient étendre les conditions de recours à ce mode de rupture.

Pour plus de précisions sur la rupture conventionnelle, vous pouvez consulter notre fiche pratique y afférente (voir lien ci-contre).

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